La force de l’éléphant : Pour que sa croissance génère pus d’emplois de qualité, Banque Mondiale

La force de l’éléphant :  Pour que sa croissance génère pus d’emplois de qualité, Banque Mondiale

Auteur : Banque Mondiale

Type de Publication : Rapport

Date de publication : Décembre 2015

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La Côte d’Ivoire en 2015 se situe parmi les pays du continent africain ayant les meilleures performances économiques, avec une croissance de son Produit Intérieur Brut (PIB) proche de 9% qui s’explique par la combinaison d’une gestion budgétaire et monétaire prudente ainsi qu’un environnement international relativement favorable.

Les perspectives pour l’économie ivoirienne à court et moyen termes sont positives, tant que le contexte extérieur reste favorable, et que les autorités maîtrisent les risques liés à leur politique ambitieuse d’investissement, y compris de partenariats avec le secteur privé, et continuent leurs efforts visant à améliorer le climat des affaires.

La Côte d’Ivoire en 2015 se situe parmi les pays du continent africain ayant les meilleures performances économiques, avec une croissance de son Produit Intérieur Brut (PIB) proche de 9%

Le principal défi pour la Côte d’Ivoire est de parvenir à une croissance plus équitable, ce qui impose la création d’emploi de qualité pour la majorité de la population. Sur tous ces plans, la Côte d’Ivoire a continué de s’améliorer en 2015, non seulement dans une perspective historique mais aussi par rapport aux autres pays africains, à savoir :

  • Croissance économique : Avec un taux de croissance du PIB estimé à 8,4%, le pays se trouve au troisième rang du continent derrière la République Démocratique du Congo et l’Ethiopie, mais devant les locomotives traditionnelles que sont le Nigéria et le Ghana.
  • Inflation : Son taux d’inflation de 1,5% le place au quatrième rang parmi les pays africains.
  • Comptes extérieurs : Le déficit de sa balance en compte courant, en légère hausse de 2,3% du PIB, place le pays au sixième rang par rapport aux autres pays africains.
  • Déficit budgétaire : Il n’y a que pour son déficit budgétaire, autour de 3,7 % du PIB, que le pays se trouve au dix-septième rang continental, étant entendu que ce déficit a été financé par le recours à l’endettement extérieur dont une large part a été non-concessionnelle

La croissance rapide observée au cours de ces dernières années est en partie un effet de rattrapage après plusieurs crises ayant secoué la Côte d’Ivoire, même si le revenu par habitant en 2015 n’a pas encore atteint le niveau d’il y a 20 ans. Au cours de ces derniers mois, la croissance ivoirienne a été portée par la rapide expansion des Bâtiments et Travaux Publics et des transports aériens.

Au total, la formation brute de capital fixe a progressé de 17,5% en 2015 contre 16,6% en 2014. Les exportations ont augmenté de 11% en 2015, soit trois fois plus vite qu’en 2014, alors que la hausse des importations a été moins rapide. Enfin, la consommation finale des ménages a augmenté de 8% soutenue par l’augmentation des revenus, notamment ceux des fonctionnaires, des planteurs du café, cacao et de la noix de cajou durant deux années consécutives. Si la dette extérieure a sensiblement augmenté, le Gouvernement a réduit sa dette intérieure. Le Gouvernement a privilégié les secteurs sociaux même si la part consacrée aux infrastructures a augmenté au cours du temps.

Quant à la répartition par fonction de la dépense publique, elle montre que contrairement à la perception quasi-générale, le Gouvernement a privilégié les secteurs sociaux même si la part consacrée aux infrastructures a augmenté au cours du temps (Tableau 1). En 2015, les dépenses vers les secteurs de l’éducation et de la santé ont capté environ 27% des dépenses totales contre approximativement 19% pour les infrastructures.

La comparaison avec le budget de 2014 indique que les parts des services sociaux et des infrastructures ont augmenté, respectivement de 2,1% et de 5%, au détriment des dépenses allouées à la défense, au service de la dette et des services généraux des administrations publiques. Cette tendance positive traduit la volonté des autorités ivoiriennes à améliorer la fourniture de services sociaux et la mise en place d’infrastructures de qualité, tout en limitant les dépenses administratives de l’État qui sont perçues comme étant moins productives pour le pays.

La politique monétaire continue d’être influencée par l’appartenance de la Côte d’Ivoire à la zone monétaire de l’UEMOA. La marge de manœuvre est automatiquement limitée dans ce contexte et le taux de croissance monétaire traduit la politique prudente de la BCEAO, avec une croissance de la masse monétaire M2 autour de 15% en 2015.

Si plusieurs pays africains sont exposés au ralentissement de l’économie chinoise, ce risque est marginal pour la Côte d’Ivoire. La hausse du prix des exportations ivoiriennes s’est accompagnée par la baisse du prix mondial du pétrole. Dans la mesure où le pays est à la fois un importateur de pétrole brut et exportateur de produits pétroliers, cette baisse n’a eu qu’un effet marginal sur sa balance commerciale, surtout qu’elle a été neutralisée par la dépréciation de la monnaie locale, le franc CFA par rapport au dollar des États-Unis. Au niveau des prix intérieurs, la répercussion a donc été moindre, expliquant la stabilité des prix de l’essence et autres produits dérivés au cours des derniers mois.

Si plusieurs pays africains sont exposés au ralentissement de l’économie chinoise, ce risque est marginal pour la Côte d’Ivoire car la Chine ne compte que pour 2% des exportations totales du pays. Au contraire, la reprise constatée dans les destinations traditionnelles, comme l’Union européenne, laisse penser que la conjoncture est plutôt favorable pour le pays. Il est cependant utile de rappeler que le ralentissement des économies africaines ne manquera pas de heurter les exportations ivoiriennes.

La Côte d’Ivoire a bénéficié du regain d’intérêt de la part des investisseurs internationaux, y compris les bailleurs de fonds. La réussite de la Côte d’Ivoire va en large partie dépendre de sa capacité à gérer les partenariats entre son secteur public et privé. De manière générale, l’économie ivoirienne est moins exposée en 2015 qu’à la fin de la dernière décennie.

La filière anacarde en Côte d’Ivoire est devenue un levier important de développement notamment dans les régions du Nord. La production de la noix de cajou a enregistré de très fortes hausses durant ces 15 dernières années. En effet, d’un niveau d’à peine 64 000 tonnes en 2 000, la production est passée à 450 000 tonnes et 700 000 tonnes respectivement en 2012 et 2015. Ainsi, en 2015, le pays est devenu le premier producteur mondial de la noix de cajou avec 25% de l’offre mondiale, devant l’Inde, précédemment leader. Le pays est également premier exportateur de la noix de cajou avec comme principaux destinataires l’Inde, le Brésil et le Vietnam. La filière regroupe environ 250 000 producteurs et fait vivre près de 2,5 millions d’ivoiriens.

La Côte d’Ivoire a bénéficié du regain d’intérêt de la part des investisseurs internationaux, y compris les bailleurs de fonds. La réussite de la Côte d’Ivoire va en large partie dépendre de sa capacité à gérer les partenariats entre son secteur public et privé

Au niveau interne, au-delà des incertitudes politiques qui se réduisent, les principaux risques sont d’ordre budgétaire. Les autorités ivoiriennes ont adopté une politique d’investissement ambitieuse car beaucoup d’insuffisances en infrastructure subsistent encore. En parallèle, la demande de services sociaux de qualité va aller en augmentant en raison de la pression démographique. L’État va devoir répondre à cette pression supplémentaire en augmentant ses recettes fiscales, notamment de la TVA dont le recouvrement reste très en deçà de son potentiel. Seule une augmentation des revenus de l’État pourra financer les dépenses publiques sans une augmentation non-contrôlée des emprunts.

Le risque financier apparait encore plus grand pour la Société Ivoirienne de Raffinerie (SIR) et la Société Nationale d’Opérations Pétrolières de la Côte d’Ivoire (PETROCI, qui avaient déjà accusé des pertes très élevées en 2014. Si en 2015, l’État a fait des efforts appréciables pour apurer partiellement ses arriérés par rapport à la fourniture de HVO faites par ces deux sociétés, des solutions plus radicales restent nécessaires pour la viabilité financière du secteur. Les résultats des audits stratégiques en cours devraient permettre d’identifier ces solutions, tant pour le court que le long terme.

Aujourd’hui la Côte d’Ivoire présente une économie avec une forte croissance mais un taux de pauvreté encore élevé. Bien qu’il soit difficile de quantifier avec certitude le taux de pauvreté et surtout son évolution au cours du temps, la dernière enquête auprès des ménages apporte certains éclaircissements. Il apparait qu’environ 46,3% de la population vit en situation de pauvreté, soit avec une dépense de consommation inférieure à 737 FCFA par jour, alors que ce taux était de 48,9% en 2008.

Cette baisse du taux n’est pas suffisante pour compenser la hausse rapide de la population et il y a environ 935 500 plus de pauvres aujourd’hui qu’en 2008 dans le pays, avec une forte concentration dans le monde rural. La croissance économique en Côte d’Ivoire ne s’est pas encore convertie en une réduction majeure de la pauvreté car elle n’a pas créé de nombreux emplois de qualité.

Il y a environ 935 500 plus de pauvres aujourd’hui qu’en 2008 dans le pays, avec une forte concentration dans le monde rural

La création d’emplois permettra aux ménages les plus pauvres de dépasser un niveau minimum de revenu, qui est indispensable pour leur permettre d’épargner et d’investir. En conclusion, le succès de la Côte d’Ivoire à créer de nouveaux emplois de qualité pour la majorité de sa population va en grande partie déterminer si le pays va continuer à croître à un rythme accéléré et si cette croissance va être partagée équitablement dans les années à venir. C’est ce défi qui doit devenir la priorité pour les décideurs ivoiriens.

  • En 2025, 22 millions d’Ivoiriens seront en âge de travailler, soit 40% de plus qu’en 2015.
  • Seul environ un Ivoirien sur quatre sera occupé dans l’agriculture car stimulée par l’urbanisation galopante.
  • La grande partie des emplois seront dans l’auto-emploi et les petites entreprises familiales en zones urbaines. La réponse au défi de l’emploi impose un programme de réformes qui doit conduire (i) à des gains de productivité dans les activités indépendantes tant agricoles que non agricoles, et (ii) à l’émergence d’entreprises dynamiques pourvoyeuses d’emplois.

Un effort collectif car la création d’emplois de meilleure qualité restera tributaire d’une croissance économique accélérée et l’amélioration des conditions tant dans le climat des affaires que de la gouvernance, de la provision de biens publics telles que l’éducation et les infrastructures de base. Sans une amélioration généralisée, la création et l’expansion des entreprises resteront limitées et donc faiblement génératrices d’emplois. Une performance individuelle car la qualité d’un emploi est aussi dépendante de la productivité de chaque travailleur, qui est elle-même corrélée à ses compétences.

Le revenu moyen par travailleur en Côte d’Ivoire est estimé autour de 97 266 FCFA ou seulement 197 US$ par mois, ce qui est inférieur à la moyenne du continent africain. Le deuxième fait marquant est que seul un travailleur sur 5 est employé dans une entreprise hors du cocon familial, gagnant un revenu moyen d’environ 306 477 FCFA (ou 523 US$) par mois. Cette comparaison souligne les disparités monétaires et inégalités qui existent sur le marché du travail en Côte d’Ivoire.

A l’horizon 2025, il est ainsi projeté que la population active atteindra environ 22 millions de travailleurs, soit 40% de plus qu’aujourd’hui. La transformation graduelle de la structure de l’emploi constitue une bonne nouvelle pour les Ivoiriens. La réponse au défi de la qualité de l’emploi en Côte d’Ivoire doit reposer sur une stratégie qui permettra d’augmenter la productivité des travailleurs. La réponse au défi de la qualité de l’emploi en Côte d’Ivoire doit reposer sur une stratégie qui permettra d’augmenter la productivité des travailleurs.

A l’horizon 2025, il est ainsi projeté que la population active atteindra environ 22 millions de travailleurs, soit 40% de plus qu’aujourd’hui

En fait, le succès de bon nombre de pays émergents a été leur capacité à encourager la transformation structurelle de leur marché du travail, tout en réussissant à accroître la productivité des activités où sont occupés la majorité de leurs travailleurs, tout au moins pendant la transition. La réponse au défi de la qualité de l’emploi en Côte d’Ivoire doit reposer sur une stratégie qui permettra d’augmenter la productivité des travailleurs.

Le rôle de l’État est décisif non seulement pour optimiser ses effets croisés mais aussi pour créer des opportunités d’emploi à travers des programmes d’emploi et des partenariats avec le secteur privé. L’expérience internationale, en particulier des pays qui ont réussi leur émergence économique, rappelle qu’un certain degré de spécificité doit exister dans les actions pour que celles-ci soient concrètes et efficaces. C’est dans cet esprit qu’est proposé ci-dessous un menu de mesures articulées autour de trois axes:

  • Augmenter la productivité des indépendants non agricoles.
  • Faciliter la création d’emplois salariés.
  • Améliorer la productivité agricole pour de meilleurs revenus

La prépondérance de l’emploi indépendant et familial se retrouve dans la plupart des pays du continent africain. Les travailleurs indépendants émergeants sont donc plus dynamiques et créateurs d’emplois que ceux qui sont déjà établis depuis plusieurs années. Les salariés sont en général mieux rémunérés que les autres catégories d’emploi. En moyenne, ils gagnent 7,7 fois plus qu’un agriculteur ou 4,8 fois davantage que les travailleurs indépendants. Les nouvelles technologies ne se limitent pas à la communication mais aussi à l’irrigation et aux nouvelles sources d’énergies.

La majorité de l’emploi sera en dehors de l’agriculture, avec l’émergence rapide de l’auto-emploi et de l’emploi familial en milieu urbain

A l’horizon 2025, la situation de l’emploi en Côte d’Ivoire sera différente de celle qui prévaut aujourd’hui dans le pays. Selon toute vraisemblance, la majorité de l’emploi sera en dehors de l’agriculture, avec l’émergence rapide de l’auto-emploi et de l’emploi familial en milieu urbain. L’emploi salarié dans les entreprises va aussi s’accroître, mais plus lentement, et devrait capter environ 3 travailleurs sur 10 d’ici 2025. Cette transformation ne doit pas surprendre, car elle est déjà en marche depuis au moins 2002, mais elle doit être bien comprise car elle modifie de manière substantielle la réflexion et l’action de politiques économiques telles qu’elles sont perçues aujourd’hui par de nombreux acteurs et décideurs en Côte d’Ivoire.

Le défi majeur pour la Côte d’Ivoire est d’assurer un emploi de qualité pour la majorité de ses travailleurs. Il est aussi utile de chercher à développer les synergies entre micro, petites et grandes entreprises à travers les réseaux de fournisseurs et de distributeurs.

 

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