Audit environnemental des sites affectés par le déversement des déchets toxiques issus du « Probo Koala », Programme des Nations Unies pour l’Environnement, 2018

Audit environnemental des sites affectés par le déversement des déchets toxiques issus du « Probo Koala », Programme des Nations Unies pour l’Environnement, 2018

Organisation affiliée : Programme des Nations Unies pour l’Environnement

Site de publication : postconflict.unep.ch

Type de publication : Audit

Date de publication : 2018

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*Les Wathinotes sont des extraits de publications choisies par WATHI et conformes aux documents originaux. Les rapports utilisés pour l’élaboration des Wathinotes sont sélectionnés par WATHI compte tenu de leur pertinence par rapport au contexte du pays. Toutes les Wathinotes renvoient aux publications originales et intégrales qui ne sont pas hébergées par le site de WATHI, et sont destinées à promouvoir la lecture de ces documents, fruit du travail de recherche d’universitaires et d’experts.


 

Contexte

Le 19 août 2006, le Probo Koala, un navire battant pavillon panaméen affrété par la société Trafigura, a déchargé 528 mètres cubes de déchets liquides dans le port d’Abidjan, en Côte d’Ivoire. Les déchets auraient été issus d’un processus industriel appelé «lavage à la soude caustique» du naphta de cokéfaction, un pétrole non raffiné contenant typiquement des taux importants de soufre.

Dans les heures qui ont suivi, les riverains des sites de déversement, alertés par une puissante odeur, ont commencé à se plaindre de difficultés respiratoires, ainsi que d’irritations oculaires et dermatologiques. Pendant les semaines suivantes, plus de 100 000 personnes ont consulté pour ces symptômes, ainsi que pour des saignements de nez, des problèmes digestifs, des nausées et des vomissements, et d’autres problèmes.

Par ailleurs, l’angoisse et la colère de la population face à cette situation ont engendré des protestations, des barricades et des manifestations violentes dans différentes parties de la ville. Malgré les mesures de dépollution, les communautés locales continuent d’émettre des préoccupations au sujet des possibles conséquences du déversement de déchets toxiques sur leur santé et leur environnement.

Conclusions de l’Audit de lONU Environnement

Les résultats des analyses de laboratoire qui ont été effectuées sur les 130 échantillons de sol, d’eau, d’air, de sédiments, de mollusques, et de fruits et de légumes prélevés permettent de tirer les conclusions suivantes au sujet des différents types de sites affectés par les déchets toxiques issus du Probo Koala :

Aucun des sites où les déchets issus du Probo Koala ont effectivement été déversés ne présente une contamination supérieure aux seuils établis par le Gouvernement de la Côte d’Ivoire pour la dépollution. Par conséquent, aucun de ces sites ne nécessite une intervention complémentaire, même au regard de normes internationales.

Des taux élevés de polluants ont été relevés dans les échantillons d’air et d’eau souterraine prélevés au site 4, à Koumassi, ce qui reflète le manque de surveillance environnementale adéquate des nombreuses petites et moyennes industries de la zone industrielle environnante.

Bien que les concentrations relevées ne dépassent pas les seuils requérant une intervention urgente, les résultats démontrent que Koumassi est en passe de devenir une «zone à risque» d’un point du vue environnemental.

Les silos du port autonome d’Abidjan, dans lesquels du maïs potentiellement contaminé a été stocké, sont exempts de polluants pouvant être liés aux déchets issus du Probo Koala.

Bien que les concentrations relevées ne dépassent pas les seuils requérant une intervention urgente, les résultats démontrent que Koumassi est en passe de devenir une «zone à risque» d’un point du vue environnemental

Les échantillons de sol prélevés au site 8 (Agboville), où le maïs potentiellement indirectement impacté par les déchets issus du Probo Koala a été composté, présentent des taux élevés de chrome.

Recommendations

Dépollution du site de compostage de maïs à Agboville: Les deux séries d’échantillons prélevés indiquant que ce site présente des taux élevés de chrome et que du chrome percole dans le système de collecte du lixiviat, ce site doit être maintenu en observation. L’accès au site doit rester interdit, et des panneaux doivent être installés afin d’avertir les personnes de ne pas pénétrer sur le site, et de ne pas y récolter de l’herbe ou des légumes.

Diligence raisonnable requise pour le démantèlement de la décharge municipale dAkouédo: Le Gouvernement a informé l’ONU Environnement que la fermeture de la décharge municipale d’Akouédo était envisagée depuis longtemps. Une fois que la date de fermeture sera fixée, un audit environnemental préalable complet devra être réalisé, comprenant la mise en place de systèmes de collecte du lixiviat et de contrôle des gaz de décharge. Il est possible que des restrictions d’utilisation, y compris pour l’agriculture sur le site, doivent également être instaurées.

Évaluation environnementale de la zone de Koumassi: Étant donné les taux de pollution relevés dans les échantillons d’air et d’eau souterraine prélevés au site 4, il est fortement recommandé que le Gouvernement: (i) s’assure que les ouvriers disposent d’un équipement de protection personnelle et d’une formation sur la santé au travail; (ii) établisse des directives relatives au contrôle des émissions et à la gestion des déchets pour les petites et moyennes industries; et (iii) entreprenne une évaluation environnementale complète de la zone de Koumassi, comprenant la qualité du sol, de l’eau et de l’air, qui servira de support à l’élaboration d’un plan d’action visant à atténuer les impacts sur la santé publique.

Il est donc fortement recommandé que le Gouvernement de la Côte d’Ivoire entreprenne l’examen d’une sélection représentative de cas d’origine et se penche sur la nécessité de mettre en place un programme de suivi de la santé de ces communautés

Bien qu’elle ne puisse pas être traitée par une enquête environnementale, la question de savoir si ceux qui ont été affectés au moment du déversement continuent de souffrir de troubles physiologiques ou psychosomatiques est d’autant plus cruciale qu’un suivi systématique des populations affectées n’a pas eu lieu au cours de cette dernière décennie.

Il est donc fortement recommandé que le Gouvernement de la Côte d’Ivoire entreprenne l’examen d’une sélection représentative de cas d’origine et se penche sur la nécessité de mettre en place un programme de suivi de la santé de ces communautés.

Comme le démontre le cas de Koumassi, des “zones à risque environnemental” se développent à Abidjan en l’absence d’une surveillance efficace. Bien que ceux-ci n’aient pas encore d’impact critique sur l’environnement et la santé publique, les conséquences d’une telle pollution peuvent rapidement se faire sentir dans une métropole en pleine croissance comme Abidjan.

 

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