Pouvez-vous nous parler de votre parcours professionnel ?
Mon parcours professionnel a commencé en octobre 2022 à Électricité de France (EDF). C’était dans le cadre d’un stage d’école pour le Master « énergies renouvelables, technologies et entrepreneuriat ». Ce Master est le fruit d’une collaboration entre l’Institut National Polytechnique Félix Houphouët-Boigny (INPHB) et l’École Polytechnique de Paris. Ce stage était pour soutenir mon projet de fin d’études. J’ai travaillé en tant qu’assistant chef de projet dans le cadre du lancement de la nouvelle filiale d’EDF spécialisée dans la commercialisation des solutions d’irrigation solaire. Après cette expérience qui m’a permis de participer à la mise en place opérationnelle de cette filiale, un stage m’a été proposé pour continuer au niveau du département des opérations à Greeno. C’est la filiale que j’ai aidé à mettre en place. Il s’agit d’une jointure entre EDF et la startup kenyane SunCulture.
Quelles sont les opportunités sur lesquelles vous vous êtes appuyé pour vous insérer professionnellement ?
J’ai passé plusieurs années pour mes études universitaires en Algérie qu’en Côte d’Ivoire. J’ai eu une bourse après l’obtention du Baccalauréat. Puis, je suis allé étudier en Algérie. Les conditions étaient plutôt bien. C’est une bourse de coopération entre les deux pays. Les deux États étaient impliqués dans tout ce qui concernait notre bien-être, les études et toutes les autres nécessités. Concernant les dispositifs que l’État ivoirien met en place, les plus méritants sont incités et encouragés à poursuivre leurs études par plusieurs moyens par l’État. Cela a été mon cas. C’est une bourse mais on n’avait pas d’aide financière au départ jusqu’au Master. Ayant eu la licence avec une bonne mention, j’ai finalement eu une aide financière pour continuer le Master et faire des recherches.
Quelle analyse faites-vous de la politique de l’État ivoirien sur le plan des énergies renouvelables ?
L’État ivoirien dans sa politique d’action des énergies renouvelables, a prévu d’avoir d’ici 2030 un mix énergétique dont la part des énergies renouvelables sera de 42%. Actuellement, il y a des projets qui sont mis en place. Il y a plusieurs projets d’envergure. Par exemple, la centrale à biomasse d’Aboisso ; qui est une ville située dans le sud-est de la Côte d’Ivoire, est la plus grande centrale d’Afrique de l’Ouest. Il s’agit d’un projet de EDF, Biokala et Meridiam en partenariat avec l’État de Côte d’Ivoire. On a aussi la centrale Boundiali ; située entre Korhogo et Kouto à l’est, qui a été mise en marche récemment. Il y a plusieurs projets comme ceux-là qui sont en place actuellement.
Parlez-nous des obstacles à surmonter par les politiques publiques en Côte d’Ivoire pour parvenir à une véritable transition énergétique ?
L’État travaille à la réalisation d’une transition. Le premier des obstacles est l’attractivité économique pour attirer les investisseurs. Les gouvernements africains ne peuvent supporter à eux seuls le coût de la transition énergétique. On a des incitations fiscales en Côte d’Ivoire. Il y a par exemple la taxe sur la valeur ajoutée pour les équipements des énergies renouvelables. Elle s’élève à environ 9%. C’est ce que j’ai remarqué dans le plan d’action des énergies renouvelables. Il y a des efforts qui sont faits pour inciter les investisseurs étrangers ou les entreprises privées nationales à se tourner vers les énergies renouvelables.
L’État ivoirien dans sa politique d’action des énergies renouvelables, a prévu d’avoir d’ici 2030 un mix énergétique dont la part des énergies renouvelables sera de 42%
L’enjeu aujourd’hui pour la Côte d’Ivoire est la diversification des sources de production énergétique. Jusqu’à présent, du moins, au regard des dernières données que j’ai consultées en 2020, 69,4 % de la production d’énergie était à base d’énergies fossiles. On a des centrales thermiques qui utilisent le gaz naturel et les énergies fossiles. Si on veut se tourner vers la transition énergétique, il faut améliorer ce pourcentage. Le plus grand défi, c’est l’investissement. Selon la Banque africaine de développement (BAD), 71,1 % de la population a accès l’énergie. Il y a encore à peu près 30 % de la population qui n’a pas accès à une énergie propre ou à l’électricité en Côte d’Ivoire. Comment aider ces populations à avoir accès à l’énergie ?
L’État pense mettre en place de minuscules réseaux Off-grid. Cependant, le réseau ne peut pas arriver partout. Il y a des populations qui sont dans des endroits très éloignés, où le réseau ne peut pas arriver. C’est pourquoi, pour un certain nombre de personnes, il y a des systèmes réseaux qui sont mis en place. Il reste le défi du financement. Actuellement, il y a des partenariats internationaux qui sont réalisés avec la BAD pour apporter de l’expertise et un financement adéquat pour relever les défis de la transition énergétique.
Comment les agriculteurs ivoiriens peuvent partir de cette transition énergétique et de tout ce qui a trait à la technologie pour améliorer le rendement de leurs exploitations ?
J’avais évoqué les systèmes d’irrigation solaire pour les petits agriculteurs. Prenons un exemple pour être plus clair. Les agriculteurs qui ont plus de moyens, pour se faciliter la tâche, vont se procurer les motopompes. Il s’agit d’une sorte de moteur qui a la capacité d’aspirer de l’eau. La pompe permet de faire circuler l’eau d’un point A vers un point B. Ces machines ont des prix compris entre 100 mille et 200 mille francs cfa. Pour pouvoir utiliser ces motos, il faut à peu près jusqu’à 70 mille francs cfa de carburant. Sur une année, un agriculteur qui a acheté sa motopompe à 150 mille francs utilise du carburant pour 80 mille francs cfa par mois ; le coût n’est pas négligeable. De même, il y a le fait d’utiliser le carburant.
Il y a encore à peu près 30 % de la population qui n’a pas accès à une énergie propre ou à l’électricité en Côte d’Ivoire
Il y aura une émission de gaz à effet de serre. La technologie qu’on propose, c’est une technologie de pompage solaire. Cette technologie va permettre aux agriculteurs d’abord d’économiser. Ils ne vont plus utiliser de carburant, cela signifie également une réduction des gaz à effet de serre et de la pollution. Il s’agit d’un investissement qui a des effets positifs à long terme. Cela peut aussi permettre d’utiliser l’eau de manière mesurée et de produire même en haute saison.
Que diriez-vous pour conclure cet entretien ?
Il faut investir dans la formation. C’est la seule façon de produire de manière durable. Par exemple, la gestion des sols, la gestion de l’eau ou bien des cultures qu’il faut commencer à produire selon le changement climatique. Il y a aussi le volet infrastructures. En effet, il faut penser à des routes qui vont permettre à l’agriculteur de livrer ses produits sans avoir de pertes post-récolte. Des entrepôts frigorifiques solaires sont en train d’être proposés par des entreprises. Cela permet par exemple de régler les problèmes de stockage et de valoriser toute la production agricole. Enfin, l’accès au financement est important afin de permettre aux agriculteurs de se procurer des intrants et engrais de qualité, des meilleures semences. Toutes ces conditions réunies permettront d’améliorer les conditions de vie des agriculteurs de manière durable selon moi.
Crédit photo : wathi.org
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